dimanche 28 décembre 2008

Mon naufragé du A

Au milieu du couloir, une ligne disparaît derrière une porte. Les battants s'ouvrent de temps en temps, laissant passer une personne ou deux, en blouse ou en tenue d'hôpital. On entend quelques mots battus au détour d'un angle, des gens fument en douce devant l'entrée, on les devine en passant. La machine à café ronronne dans le hall. Je sors un instant. Je m'éloigne un peu. Sous la statue de Bernard Jobin, j'ouvre mon paquet et j'allume à mon tour une toute cousue.
La température à encore baissée. Elle doit être descendue tout prés de zéro. Je m'en fous. J'avance vers les arbres de Chamars en remuant entre les lèvres.
"Philémon"

mercredi 24 décembre 2008

One trip one noise

A six heures du matin, le vingt deux décembre, nous roulions.
Nous avons traversé le centre ville dans la nuit qui finissait, ou dans le jour qui commençait.
A six heures ce matin là, dans l'autoradio nous avons écouté "one trip one noise" en concert par Noir Désir.
Nous sommes entrés dans la maternité sous les néons de l'entrée d'urgence. Nous avons guetté sur le moniteur le cœur d'un enfant à naître, comme on guette des pas sur un chemin.
Le temps s'allongeait. Le jour se levait définitivement.
Le temps n'avait plus qu'une importance relative.
Et quand, entre les murs ont résonné ses premiers cris, sa mère l'a pris contre elle en lui murmurant "tu as fait un long voyage, enfin tu es là"…

mardi 23 décembre 2008

Etre au monde

Je ne sais plus rien de ce qui existe. Je ne vois plus rien de ce qui tourne. Ce qui même gravite, m'illusionne. Tout me file entre les doigts.
Comme perdus les sens du solide ou liquide, de l'âpre, du doux, du rugueux.
Je suis quelque part. Des gens me croisent.
Je ne sais plus rien de ce qui résiste à mes mots, à mes idées, à mon regard.
Je ne sais plus rien du monde. Et pourtant je le tiens entre mes mains.

mercredi 17 décembre 2008

Coco

Ce rêve encore frais, au matin, dans les brouillards.
Ce rêve aux poches vides, ce rêve aux souvenirs batailleurs
Cette nuit qui s'avance
Où il demeure et s'active
Ce secret sur nos visages, ce calcul mathématique irraisonné
La pluie et ses étincelles rougies
Ce rêve têtu comme la misère
Ce rêve qui me tient et sans lequel je ne serais déjà
Plus qu'un masque
Ce rêve tremblant de ne pas arriver à se croire

Ce rêve vous ne le réinventerez pas.

dimanche 7 décembre 2008

Dur

Chaque fois cela sera dur. A chaque fois quelque chose vacillera, et au coeur de l'après midi, sur les regards glissera comme un voile gris et léger. L'étrange sensation ne nous quittera pas. En trempant mes lèvres dans le verre de champagne, je me souviendrai de nos verres qui tintent.
Droits et debout, nous nous méfierons des pièges. Combien seront injustes les souvenirs rapportés, combien nous sembleront déplacées telle anecdote ou telle parole.
Nous nous sentirons bien seuls. Au fond de nous la douleur de l'autre sera difficile à supporter, et nous voudrions qu'elle n'existât pas.
Chaque fois ce sera dur. Dur à affronter. Dur à prononcer. Ce voile sera sa présence. Et il nous tiendra chaud.